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Panorama DossierLa fièvre de la Vallée du Rift : une urgence sanitaire récurrente face à laquelle il faut s’organiser

Dossier Posté sur 2021-03-08 08:54:06

La fièvre de la Vallée du Rift : une urgence sanitaire récurrente face à laquelle il faut s’organiser

Auteurs

Baptiste Dungu (1)* & Assaf Anyamba (2)

(1) Chief Executive Officer, Onderstepoort Biological Products Ltd, Onderstepoort, Pretoria, 0110 (Afrique du Sud).
(2) Research scientist, Sciences and Exploration Directorate, National Aeronautics and Space Administration (NASA), Greenbelt, MD 2077 (États-Unis d’Amérique).

* Contact auteurs : badungu@gmail.com

Les désignations et dénominations utilisées et la présentation des données figurant dans cet article ne reflètent aucune prise de position de l’OIE quant au statut légal de quelque pays, territoire, ville ou zone que ce soit, à leurs autorités, aux délimitations de leur territoire ou au tracé de leurs frontières.
Les auteurs sont seuls responsables des opinions exprimées dans cet article. La mention de sociétés spécifiques ou de produits enregistrés par un fabricant, qu’ils soient ou non protégés par une marque, ne signifie pas que ceux-ci sont recommandés ou soutenus par l’OIE par rapport à d’autres similaires qui ne seraient pas mentionnés.

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La fièvre de la Vallée du Rift est une maladie virale aigüe des animaux domestiques (bovins, buffles, moutons, chèvres et camélidés) et des humains. Elle est endémique en Afrique subsaharienne, dans la péninsule arabique (Arabie Saoudite et Yémen) et à Madagascar. Dans les pays touchés, elle constitue une menace pour la santé publique et le commerce de bétail. Les pertes imputables à cette maladie depuis 2006 sont ainsi estimées à 250 millions USD. Le virus est capable de pénétrer de nouvelles régions par le biais de bétail importé ou de moustiques vecteurs infectés. Les épizooties et les épidémies de fièvre de la Vallée du Rift sont associées à des périodes de précipitations exceptionnelles (supérieures à 60 jours) qui permettent à de nombreuses générations de vecteurs infectés de se propager et de contaminer hommes et troupeaux.

Dans les pays et les régions où la fièvre de la Vallée du Rift est endémique, lutter contre cette maladie, la prévenir et en atténuer les effets nécessite des mesures efficaces conjuguant surveillance passive et surveillance active. La surveillance passive de cette maladie repose sur la surveillance zoosanitaire générale conduite par les Services vétérinaires, qui prend notamment en compte les déclarations des éleveurs et d’autres secteurs impactés. La surveillance active, quant à elle, comprend les mesures prises par les Services vétérinaires pour réaliser un suivi spécifique de l’éventuelle circulation du virus, ainsi que les mesures prises pour collecter et analyser des données relatives aux facteurs directs d’apparition de la maladie, par exemple le climat et la pression des insectes vecteurs. Les mesures de lutte contre l’infection consistent donc en une prophylaxie médicale et une prophylaxie sanitaire. La prophylaxie médicale consiste à vacciner et à mettre en œuvre une stratégie vaccinale appropriée, tandis que la prophylaxie sanitaire se concentre sur les systèmes de surveillance climatique qui servent à renseigner les systèmes d’alerte précoce. Les systèmes d’alerte précoce permettent une surveillance et un contrôle ciblés des vecteurs et, lorsque des zones à risque sont identifiées, ils permettent de mettre en place un zonage et des contrôles des mouvements de bétail afin de réduire le risque de propagation chez l’homme et l’animal.

La coordination entre le secteur de la santé humaine et celui de la santé animale est d’une importance capitale

À l’heure actuelle, on ne remarque guère la présence de la fièvre de la Vallée du Rift avant que des cas ne surviennent dans la population humaine. Il faut que cela change. Dès l’apparition de cas chez les animaux, des systèmes d’alerte à l’usage tant du secteur vétérinaire que du secteur de la santé publique peuvent fortement en diminuer les conséquences sanitaires tant chez l’homme que chez l’animal.

La surveillance climatique et les systèmes d’alerte précoce

Les systèmes d’alerte précoce actuels traitent des données correspondant à différents paramètres climatologiques, tels que la température des eaux de mer superficielles (indicatrice de la phase et de l’amplitude du phénomène « El Niño – Oscillation australe »), les niveaux de précipitations ou l’état de la végétation. Ces données servent à cartographier les zones géographiques où il existe un risque d’apparition de foyers [1] (Fig. 1). Ces systèmes d’alerte précoce peuvent permettre de gagner de trois à six mois avant l’apparition éventuelle d’un foyer (Fig. 2). Dans les régions jugées à risque potentiel, l’alerte précoce doit s’accompagner d’un suivi et d’un contrôle des vecteurs sur le terrain et être associée à une campagne de vaccination et de sensibilisation du public [2].

Par ailleurs, en période inter-épidémique il est nécessaire de mener des opérations de préparation à l’urgence et à la résilience. Lorsque le climat est instable et les précipitations extrêmes, le risque d’apparition de la maladie est élevé [3]. Il est important que les stratégies visant à la maîtriser intègrent une approche fondée sur le risque, qui se traduira par exemple par des campagnes en faveur de la santé ou par l’application d’une vaccination en fonction des saisons et des zones géographiques.

La stratégie vaccinale

Les vaccins actuellement utilisés pour protéger le bétail contre la fièvre de la Vallée du Rift ont clairement prouvé leur efficacité pour endiguer la maladie dans des situations d’enzootie et d’épizootie. À l’heure actuelle, l’approche vaccinale [4] est encore peu répandue ; elle devrait être appliquée dans d’autres pays d’endémie ou à risque. La non-vaccination révélée par plusieurs foyers récents a un coût qui justifierait de mettre en place des stratégies vaccinales au niveau national et régional, comme par exemple la constitution de banques de vaccins régionales.

Conclusions

Les pays doivent à la fois mettre en place des stratégies vaccinales efficaces contre la fièvre de la Vallée du Rift, instaurer des mesures de lutte contre les vecteurs de cette maladie, et ne pas négliger les systèmes d’alerte précoce. Pour une réponse efficace face aux alertes et aux flambées de fièvre de la Vallée du Rift, l’approche régionale est essentielle dans les régions à haut risque, et elle doit impliquer la santé publique.

carte afrique
Fig. 1. Carte composite figurant le risque de fièvre de la Vallée du Rift avec indication des zones à risque en rouge et indication de l’emplacement de divers foyers entre 2006 et 2011. Les épicentres régionaux des foyers se situent en Afrique orientale et en Afrique australe et sont modulés par la variabilité des précipitations associées aux phases El Niño et La Niña du phénomène El Niño – Oscillation australe.
Fig. 2. Chronologie idéale de l’alerte précoce contre la fièvre de la Vallée du Rift, basée sur les données de l’Afrique orientale et de l’Afrique australe.
Conception : Assaf Anyamba ; réalisation : Heidi Tubbs, Universities Space Research Association (USRA) & NASA/Goddard Space Flight Center.
http://dx.doi.org/10.20506/bull.2020.2.3151

Références

  1. Anyamba A., Chretien J.P., Small J., Tucker C.J., Formenty P.B., Richardson J.H., Britch S.C., Schnabel D.C., Erickson R.L. & Linthicum K.J. (2009). – Prediction of a Rift Valley fever outbreak. Proc. Nat. Acad. Sci., 106 (3), 955–959. https://doi.org/10.1073/pnas.0806490106.
  2. Anyamba A., Linthicum K.J., Small J.S., Britch S.C., Pak E., de La Rocque S., Formenty P., Hightower A.W., Breiman R.F., Chretien J.P., Tucker C.J., Schnabel D., Sang R., Haagsma K., Latham M., Lewandowski H.B., Osman Magdi S., Mohamed A., Nguku P.M., Reynes J.M. & Swanepoel R. (2010). – Prediction, assessment of the Rift Valley fever activity in East and Southern Africa 2006–2008 and possible vector control strategies. Am. J. Trop. Med. Hyg., 83 (2 Suppl), S43–S51. https://doi.org/10.4269/ajtmh.2010.09-0289.
  3. Martin V., Chevalier V., Ceccato P., Anyamba A., De Simone L., Lubroth J., de La Rocque S. & Domenech J. (2008).– Les conséquences du changement climatique sur l’épidémiologie et la prophylaxie de la fièvre de la Vallée du Rift. In S. de La Rocque, G. Hendrickx & S. Morand (eds). Changement climatique : impact sur l’épidémiologie et les stratégies de contrôle des maladies animales. Rev. Sci. Tech. Off. Int. Epiz, 27 (2), 413–426. https://doi.org/10.20506/rst.27.2.1802.
  4. Dungu B., Lubisi B.A. & Ikegami T. (2018). – Rift Valley fever vaccines: current and future needs. Curr. Opin. Virol., 29, 8–15. https://doi.org/10.1016/j.coviro.2018.02.001.

Informations relatives à l'article

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