Perspectives Posté sur 2020-07-07 10:10:09
Opinions et stratégies
Peste porcine africaine : une contagiosité modérée qui pose un dilemme
Mots-clés
Auteurs
K. Depner (1)*, K. Dietze (1), A. Globig (1), L. Zani (1), T. Mettenleiter (1) & E. Chenais (2)
(1) Friedrich-Loeffler-Institut (FLI), Bundesforschungsinstitut für Tiergesundheit, Greifswald-Insel Riems (Allemagne).
(2) Statens veterinärmedicinska anstalt (SVA), Uppsala (Suède).
* Contact auteurs : klaus.depner@fli.de
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Le facteur anthropogénique
C’est principalement par le biais des activités humaines que la peste porcine africaine parvient à se porter sur de longues distances et que le virus atteint des populations de porcs ou de sangliers auparavant indemnes. Ceci étant avéré, il est extrêmement important d’identifier le facteur anthropogénique ou « facteur humain » afin de comprendre le modèle de propagation de la maladie. Si nous ne prenons en compte que les caractéristiques biologiques de la peste porcine africaine (contagiosité, résistance à l’inactivation, taux de létalité, etc.), en négligeant les paramètres humains, nous ne serons pas en mesure de circonscrire l’épizootie [1].
Le dilemme de la détection précoce
Selon des observations de terrain [2, 3], la peste porcine africaine peut passer inaperçue dans les populations de porcs domestiques et de sangliers jusqu’à ce que la mortalité atteigne des taux véritablement élevés, et ce, plusieurs semaines après l’introduction du virus. En revanche, une surveillance passive améliorée, avec la réalisation de prélèvements ciblés et de tests sur les animaux morts, s’est montrée efficace pour déceler la maladie à un stade précoce [3]. Mais paradoxalement, si l’on considère, d’une part, qu’une surveillance efficace permet de détecter la maladie avant qu’elle ne provoque une mortalité porcine massive, et, d’autre part, que la contagiosité est relativement basse, on se trouve confronté à un dilemme au moment de justifier la solution drastique de la destruction d’un cheptel. Face à ce dilemme, en se fondant sur une meilleure compréhension de l’épidémiologie de la peste porcine africaine et sur les mesures de biosécurité les plus appropriées, un abattage sanitaire partiel a été appliqué dans certaines circonstances spécifiques et après concertation. Il est donc essentiel d’adapter au cas par cas la surveillance et les stratégies de lutte contre cette maladie.
Le triangle de la persistance
L’association d’un taux de létalité élevé et d’une forte résistance du virus à l’inactivation assure sa persistance sur le long terme dans les cadavres des animaux et dans l’environnement ; cependant, le taux de contamination relativement bas empêche que la population hôte soit totalement dépeuplée (Fig. 2). L’interaction de ces trois paramètres offre toutes ses chances à la persistance du virus localement en même temps qu’à sa diffusion géographique constante. Par conséquent, l’éradication de la peste porcine africaine dans les habitats naturels est très problématique en l’absence d’outils alternatifs de contrôle de la maladie, comme pourrait l’être la vaccination [1].
http://dx.doi.org/10.20506/bull.2020.1.3121
Références
- Chenais E., Depner K., Guberti V., Dietze K., Viltrop A. & Ståhl K. (2019). – Epidemiological considerations on African swine fever in Europe 2014–2018. Porc. Health Manag., 5 (1), 6. https://doi.org/10.1186/s40813-018-0109-2.
- Lamberga K., Seržants M. & Oļševskis E. (2018). – African swine fever outbreak investigations in a large commercial pig farm in Latvia: a case report. Berl. Münch. Tierärztl. Wochenschr. https://doi.org/10.2376/0005-9366-18031.
- Zani L., Dietze K., Dimova Z., Forth J.H., Denev D., Depner K. & Alexandrov T. (2019). – African swine fever in a Bulgarian backyard farm: a case report. Vet. Sci., 2019 (6) 94. https://doi.org/10.3390/vetsci6040094.
- Oļševskis E., Guberti V., Seržants M., Westergaard J., Gallardo C., Rodze I. & Depner K. (2016). – African swine fever virus introduction into the EU in 2014: experience of Latvia. Res. Vet. Sci., 105, 28–30. https://doi.org/10.1016/j.rvsc.2016.01.006.
- Chenais E., Ståhl K., Guberti V. & Depner K. (2018). – Identification of wild boar-habitat epidemiologic cycle in African swine fever epizootic. Emerg. Infect. Dis., 24 (4), 810–812. https://doi.org/10.3201/eid2404.172127.